La transformation progressive des espèces au cours du temps constitue l'évolution biologique.
Ce phénomène est étroitement lié au processus de naissance de nouvelles espèces (spéciation) par différenciation et radiation à partir d'une espèce ancestrale.
Ainsi, tout changement dans le temps d'un caractère commun aux individus d'une espèce peut être assimilé à l'évolution. Ces changements peuvent être de faible ampleur (généralement sur un temps court), on parlera alors de microévolution, ou alors de plus grande ampleur (pour des temps longs, en millions d'années), on parlera cette fois de macroévolution.
La comparaison d'espèces proches renseigne sur la microévolution alors que la macroévolution est illustrée par la comparaison d'espèces très différentes.
Dans un contexte de confusion entre science et religion (créationnisme chrétien), Charles Darwin élaborera sa théorie de l'évolution et élucidera le mystère des mécanismes de celle-ci.
Bien sûr, d'autres l'ont précédé, une vision transformiste apparaît progressivement à la fin du XVIIIe siècle. Mais lui seul trouvera la solution sans doute grâce à son approche scientifique remarquable pour l'époque.
Ce que vous allez apprendre
- Quels ont été les éléments déclencheurs du cheminement de pensée de Darwin
- Les grands axes de sa théorie
- Ce qu'a découvert Darwin
Charles Darwin
Il faut que la raison l'emporte sur l'imagination.
Tour du monde en bateau ou la naissance d’une intuition
En décembre 1831, Charles Darwin embarque sur le Beagle pour un voyage qui jouera un rôle capital dans la naissance de la théorie de l’évolution. Il y accumulera des observations et déductions qui constitueront la base de sa théorie.
La biodiversité
Pendant tout son périple, Darwin collecte minutieusement des échantillons d’espèces très diverses (5 436 spécimens exactement). Les principaux enseignements qu’il en tire sont, d’une part, l’importance de deux piliers de ce qu’on appelle maintenant la biodiversité (multitude des espèces et polymorphisme intra spécifique) et, d’autre part, la répartition non-aléatoire des ressemblances entre espèces, ce qui mènera à l’idée de parenté évolutive.
La lutte pour la survie
Lorsque Charles Darwin découvre les forêts tropicales d’Amérique du Sud, ses observations contrastent avec l’image naïve du paradis terrestre souvent proposée de cet environnement. Il ne voit qu’une lutte incessante entre les espèces et entre les individus d’une même espèce, se dit fasciné par la pourriture, terreau de la vie des autres organismes. Il prend conscience que la vie n’est pas un « long fleuve tranquille » mais au contraire une lutte acharnée permanente pour la survie.
Adaptation et origine commune des espèces
L’étape la plus connue du voyage du Beagle est celle des Galápagos. Ce qui fascine particulièrement Darwin, c’est la biodiversité spécifique de ces îles et la présence de nombreuses espèces endémiques. Il étudie en particulier un ensemble d’oiseaux connus maintenant sous le nom de « pinsons de Darwin ».
Les groupes situés sur les différentes îles se ressemblent mais forment des espèces distinctes :
- Ils utilisent des niches écologiques différentes.
- Chacun possède des caractéristiques adaptées à son mode de vie (exemple des becs et du régime alimentaire).
Il en conclura plus tard que les pinsons des Galápagos dérivent d’une espèce continentale et que bien que très proches, ils se sont subtilement adaptés aux conditions locales de chaque île. Dans la nature, les espèces se transforment avec le temps…
Les temps géologiques et la succession des espèces.
Charles Darwin s’intéresse également à la géologie. Trois observations joueront un rôle important :
- Des couches sédimentaires contenant des fossiles marins se retrouvent parfois à haute altitude.
- Les paysages chaotiques et vallonnés de l’Australie.
- La croûte terrestre n’est pas stable et elle se modifie avec le temps, comme il l’a lui-même constaté lors d’un tremblement de terre pendant une excursion en Amazonie.
L’explication la plus raisonnable de ces observations est que des sols sous-marins se sont soulevés pour constituer des montagnes et que de lents processus d’érosions ont façonnés les paysages. Cette hypothèse est très audacieuse pour son époque puisque la vision communément admise dans ce domaine est celle d’un monde créé par Dieu le 22 octobre 4004 avant Jésus-Christ. L’allongement des temps géologiques devenait alors compatible avec une histoire longue et graduelle de la vie.
Lors d’analyse de couches sédimentaires, Darwin découvre un certain nombre de fossiles dont ceux de Mégathérium (paresseux géant) ou de Glyptodon (tatou géant). Ces animaux disparus sont pourtant très apparentés à des espèces actuelles de l’Amérique du Sud. Des espèces proches pourraient-elles se succéder ?
Charles Darwin
Un mathématicien est un aveugle qui, dans une pièce sombre, cherche un chat noir qui n’y est pas.
La théorie darwinienne
A la fin de ce voyage, sa théorie de l’évolution n’est pas encore clairement élaborée mais les éléments principaux sont d’ores et déjà réunis. Il mettra vingt-trois ans avant de publier ses résultats, vingt-trois ans d’une longue maturation, d’une vérification minutieuse de chaque point, d’une confrontation systématique de ses idées avec la réalité et les travaux de ses contemporains.
C’est le 24 novembre 1859 que paraît donc son œuvre majeure : « De L’Origine des espèces par le moyen de la sélection naturelle, ou la préservation des races favorisées dans la lutte pour la vie », plus connu sous le titre court « L’origine des espèces ».
La théorie proposée par Darwin peut se décomposer en plusieurs points :
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La diversité des formes est la règle dans les populations naturelles
Chacun d’entre nous peut faire ce constat en observant les individus d’une espèce. Les caractères susceptibles de varier sont multiples, tout aussi bien morphologiques (couleur, taille, forme) que physiologiques (tolérance au froid, au chaud, à un parasite, etc.)
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Chaque génération produit plus d’individus que ce que l’environnement peut en accueillir
Il suffit pour s’en convaincre de calculer le nombre d’individus qu’un seul couple de souris pourrait générer durant sa vie. Sachant que la gestation dure trois semaines, que la maturité sexuelle est atteinte en six semaines, que chaque femelle fait en moyenne six portées par an et que la durée de vie d’une souris est d’environ deux ans, on arrive à ce chiffre faramineux de plusieurs millions de descendants ! Aucun de nos greniers n’accueille de telles colonies… Une seule solution s’impose : tous les individus ne peuvent survivre à chaque génération. Mais la survie ne se fait pas aléatoirement.
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Il y a sélection naturelle des individus de la population
La survie de chaque individu dépend de ses capacités particulières. La sélection favorise les individus les mieux adaptés à leur environnement. Ces derniers se reproduisent davantage, le caractère ainsi responsable de leur avantage sera plus efficacement transmis à la descendance et deviendra de plus en plus fréquent.
Ce principe appliqué au fameux exemple du cou des girafes implique qu’il existe dans une population une diversité de taille des cous, que les girafes ayant le cou le plus long accèdent plus aisément aux feuilles hautes des arbres, échappant ainsi à la concurrence avec les autres girafes et les individus des autres espèces. Partant du principe que ce caractère est héritable, la population s’enrichit de génération en génération en girafes au long cou. Associé à un processus permanent de variation, cette sélection induirait une augmentation progressive du cou au cours des générations.
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La sélection sexuelle
Ce point n’est pas évoqué dans « L’origine des espèces », il sera introduit plus tard par Darwin. Il s’agissait, par exemple, d’expliquer l’existence de la queue du paon. Comment un tel atour pourrait-il dans la nature procurer un avantage ? Il paraît plus vraisemblable au contraire qu’il s’agisse d’un élément diminuant la possibilité de fuite devant les prédateurs.
Darwin introduit alors la notion de sélection sexuelle : chaque individu a une capacité spécifique à se reproduire, dépendant de sa fécondité ou, comme pour le paon, de sa capacité à trouver une ou des partenaires. La magnifique roue du paon lui permet donc de séduire efficacement les femelles et d’augmenter la transmission de ce caractère à la descendance, ce qui compense largement les inconvénients liés à la prédation.
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Deux populations qui se différencient deviennent progressivement deux espèces
Deux populations d’une même espèce vivant dans des conditions différentes vont accumuler par sélection des caractères distincts. A terme, en perdant la capacité de se croiser, ces populations donneront deux espèces.
L’ensemble de la biodiversité peut donc être représenté sous forme d’un arbre, chaque fourche représentant une divergence radiative ou une spéciation. La ressemblance entre les espèces est la marque de leur parenté évolutive. L’homme n’occupe dans cet arbre qu’une place comparable à celle des autres espèces. Une espèce qui ne disposerait pas de la diversité nécessaire à son adaptation disparaîtra. On trouve donc très facilement la place des espèces disparues (fossiles) dans ce schéma.
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Une fois l’étape précédente du raisonnement admise, il suffit de pousser la logique jusqu’au bout pour arriver à la conclusion finale de ce travail : les espèces sont issues d’une même forme de vie primordiale.
Autrement dit, toutes les formes de vie ont une parenté plus ou moins grande et il y a une seule origine pour toutes les espèces. Pour éviter toute idée d’orientation dans l’évolution, Darwin préfèrera l’image du corail pour représenter la diversité du vivant, le point central de ce corail représentant la forme de vie primordiale, l’évolution se produisant dans toutes les directions en même temps.
Pour conclure
Galilée avait retiré la terre du centre de l'univers, Darwin a descendu l'homme du haut de l'échelle du vivant. C'est sans doute la principale raison des attaques qu'il a subies et que la théorie de l'évolution suscite encore. Il a également fait entrer la biologie dans le monde de la science et l'a affranchi d'une partie de ses tutelles philosophiques et religieuses. L'épistémologie de la biologie moderne lui doit ses principaux fondements.
Dans la deuxième partie de cet article, découvrez quelles étaient les lacunes de la théorie de Darwin et comment la biologie du XXIe siècle s'est inspirée d'elle.
D'après vous, qu'est-ce que Darwin aurait raté de plus gros en matière de sélection ?
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Philippe Lachaume
Maître de conférence en génétique — UCA
Membre du laboratoire Réparation du Génome Mitochondrial (RGM) EA—4645 UBP.
Responsable de la mention « Sciences de la vie » de la licence STS (UBP).
Responsable des enseignements de génétique des populations et évolution à l'UFR ST et ESPE de Clermont-Ferrand.
« Mais lui seul trouvera la solution sans doute grâce à son approche scientifique remarquable pour l’époque. » Quid de Wallace ? 😉
Ou Lamarck d’une certaine façon et d’autres en réalité… Les différents travaux de l’époque mériteraient certainement une synthèse pour compléter ce premier article ! Peut être seriez-vous intéressé par l’exercice ?
D’accord avec cette remarque, le « lui seul » est excessif. Les grandes découvertes ne doivent pas tout aux grands hommes. Les époques sont toujours propices à leurs émergences qui peuvent être multiples. Le problème de Wallace est que bien peu de gens le connaissent. En science, la diffusion des idées valent au moins autant que leur qualité… Darwin, sans y participer très activement, a réussi ce point.