Culture sur butte : pourquoi et comment ?

La technique de culture sur butte se répand désormais largement, autant dans les potagers que dans les exploitations maraîchères.

Elle ne reste pas pour autant l’apanage des permaculteurs ou autres agro-écologistes que nous sommes… Et c’est là une excellente chose !

La démocratisation galopante de techniques aussi efficaces que cohérentes à bien des niveaux souligne une prise de conscience agricole dont les ramifications vont au-delà du pré-carré des innovateurs et convaincus.

Ce que vous allez apprendre

  • Les origines de la culture sur butte
  • En quoi la technique est intéressante sur le terrain
  • Comment réaliser trois différents types de culture sur butte
  • Quelles sont les contraintes et limites de la technique
Chef Seattle
L’homme n’a pas tissé la toile de la vie, il n’est qu’un fil. Quoi qu’il fasse à la toile, il le fait à lui-même.

Un peu d’Histoire de la culture sur buttes

Mise enplace d'une culture sur butte
Mise enplace d'une culture sur butte Øyvind Holmstad

La culture sur butte connaît en réalité plusieurs origines intellectuelles, si l’on peut dire, ce qui explique en partie qu’il en existe différents types.

La première, que nous apprécions tout particulièrement chez DEFI-Écologique, est en réalité l’application concrète d’une connaissance du fonctionnement du sol, notamment à travers les mycorhizes qui y évoluent.

La technique s’attache alors à utiliser les différentes connaissances liées au fonctionnement d’un sol, afin de les mettre en œuvre à travers la réalisation d’une structure, la culture sur butte, qui maximiserait le fonctionnement de ce sol créé de toute pièce (même si en contact avec ce dernier).

La deuxième est fondamentalement plus pragmatique et tend à valoriser la production de pseudo-déchets d’un potager ou d’une exploitation pour créer un support de culture cohérent, productif et qui peut s’inscrire dans un schéma de fonctionnement plus proche de celui de l’environnement qui nous entoure.

On pourrait ici presque affirmer que c’est une manière de recycler des déchets, techniquement plus poussée que le compostage, puisqu’ils deviennent un réel outil de production.

Dès sa genèse, la technique de culture sur butte s’inspira des travaux de Masanobu Fukuoka, dont les travaux sont régulièrement évoqués sur notre blog, mais aussi de ceux moins connus, de Marc Bonfils à Emilia Hazelipp. Elle est très utilisée en permaculture.

La rotation des cultures

Une culture sur butte ne se suffit pas à elle-même : il s’agit de continuer le raisonnement de manière globale, même si le socle est excellent.

En ce sens, il s’agit de prévoir autant que faire se peut des rotations de cultures, de type « engrais vert », puis « légumes et fruits », puis « légumes et feuilles », puis « légumes et racines ».

La rotation n’est pas forcément obligatoire, si tant est que vous ne fassiez pas une monoculture sur l’intégralité de la butte. Dans ce dernier cas, la rotation est par contre indispensable.

Ainsi, si vous évitez la monoculture et pouvez plus facilement vous passer de la rotation, il sera néanmoins bien plus efficace et sécurisant pour votre production d’appliquer les différentes techniques d’associations de cultures.

Les avantages de la culture sur butte ?

La culture sur butte permet de créer un milieu riche, car particulièrement favorable à la microfaune du sol.

Le sol n’a alors de cesse d’enrichir ce milieu, à travers les excréments de la microfaune, mais aussi grâce à la présence de nombreux champignons décomposeurs.

Une telle culture permet d’obtenir une terre meuble et dont la composition lui permet de rester meuble dans le temps. Mais c’est aussi grâce au paillage, qui est un élément clef de la technique !

Une butte facilite le travail, grâce à sa hauteur, qu’il est possible de moduler en fonction de la taille des personnes qui vont y intervenir.

Elle limite le travail pour la simple et bonne raison que, quelle que soit l’intervention à réaliser sur la butte, celle-ci ne se fera pas à l’aide d’outils (hors mise en place).

Elle rend également le travail plus aisé dans la gestion des adventices, à la fois parce que la terre reste meuble, mais aussi parce qu’il n’est pas nécessaire de se baisser pour les éliminer.

La technique de la culture sur butte voit aussi un de ses principaux avantages dans la gestion de l’eau, avec un besoin en arrosage particulièrement faible, voire inutile selon les climats.

Elle augmente la surface de production en donnant du volume au sol, on passe d’un terrain plat à un terrain bombé. Cette caractéristique nécessite d’appréhender la butte comme un milieu à part entière avec ses différents horizons de sols (couches).

Il est important d’exploiter ces couches en différentes fonctions. Les plantes exigeantes doivent être sur le haut de la butte et les moins exigeantes sur les côtés et le bas. Ici aussi la technique de cultures associées permet d’optimiser les résultats.

Avant de réaliser une butte, il est important de connaitre son sol. De nombreuses personnes réalisent des buttes qui peuvent être contre-productive ou inutile, alors que leur terre de départ était très bonne. Puisque la plupart des buttes, lors de leurs réalisations, ont un impact important sur la vie du sol, il est important de se demander s’il est vraiment utile d’en construire une.

Jean-Pierre Raffarin
Mais, on ne va pas favoriser une agriculture marginale !

Butte en terre

Schéma butte en terre
Schéma butte en terre Canop'Terre

La technique de butte en terre permet d’optimiser le réchauffement de la terre dès le printemps.

En cas de forte pluie ou de sol hydromorphe, la butte en terre permet l’écoulement de l’eau entre les buttes. Elle évite ainsi la saturation en eau au niveau du système racinaire. La gestion de l’infiltration de l’eau peut même être améliorée par un système de drainage dans les allées.

Butte en lasagnes

Schéma de butte en lasagne
Schéma de butte en lasagne Canop'Terre

Cette technique de culture sur butte est directement issue d’un besoin de recycler des déchets produits en trop grandes quantités dans le jardin ou sur l’exploitation elle-même.

Le principe en est relativement simple : il suffit de trier les différentes matières sous forme de couches.

Ces couches se répartissent entre matières riches en azote (reste d’aliments, de tontes et toutes matières encore vertes) et matières riches en carbone (feuilles mortes, paille et toutes matière brunes).

L’intérêt de cette butte est d’utiliser une matière première locale, qui la met de fait en cohérence avec la vie du sol.

Il faut bien l’arroser une fois sa fabrication effectuée, afin d’enclencher son fonctionnement.

Il faut également porter un effort sur l’aération générale de la butte, en y intégrant du petit branchage de bois mort de manière aléatoire.

La meilleure option consiste à réaliser de nombreuses couches fines de matières plutôt que quelques grosses couches.

La butte en lasagnes est à réalimenter tous les ans, à minima d’une double couche.

Butte en lasagnes

Comment créer une butte en lasagne, aussi appelée butte sandwich

Regarder la vidéo sur YouTube

Le saviez-vous ?

Une technique comme celle de la culture sur butte ne s’appréhende pas en un claquement de doigt.

Il est essentiel de faire ses premières expériences et de se renseigner auprès de personnes qui ont déjà tenté cette petite aventure.

Logo de l'association Canop'Terre
Logo de l'association Canop'Terre Canop'Terre

Si vous souhaitez allez plus loin en intégrant votre culture sur butte à une réflexion agroécologique plus large sur votre jardin ou votre exploitation, il existe des centres de formations animés par des professionnels tout à fait compétents en la matière et qui pourront vous accompagner sur des exemples grandeur nature !

Dans la région Grand Est par exemple (et parce que nous les connaissons bien), c’est l’association Canop’Terre et Olivier Lavaud, mycologue de formation et spécialiste en agroécologie, qui pourront vous en dire bien plus à propos de la culture en butte, dès ce mois d’août.

Voir les formations Canop’Terre

Butte sandwich Robert Morez

Schéma butte sandwich Robert Morez
Schéma butte sandwich Robert Morez Canop'Terre

Cette technique un peu plus complexe s’inspire clairement de la Nature pour créer un milieu riche et favorable à la culture sur un plus long terme (jusqu’à 4 ans).

Il est à noter que la première année de production verra une fertilité particulièrement spectaculaire, ce qui est à prendre en compte dans le choix des plants que l’on y disposera.

Moins élevée que la butte en lasagnes, du fait de son enterrement partiel, les fagots de branchages ont toute leur importance pour amener l’eau de pluie en son cœur.

Butte sandwich Robert Morez

Première étape de construction de la butte Robert Morez

Regarder la vidéo sur YouTube

Gros plan sur un campagnol des champs (Microtus arvalis)
Gros plan sur un campagnol des champs (Microtus arvalis) Dieter TD

S’il est un problème à prendre en considération au moment de vous lancer dans une culture sur butte, qu’elle soit seule et de taille raisonnable ou qu’elles soient nombreuses et longues, c’est le fait de potentiellement attirer des micromammifères et notamment le campagnol.

En effet, si l’on se rapproche bien plus du fonctionnement de la nature avec la culture sur butte, il est logique que toute la nature, même celle qui peut agacer, s’invite à table.

Chats domestiques (avec modération, car il ne faut pas oublier que les chats domestiques font des ravages auprès de la petite faune), perchoirs à rapaces nocturnes comme diurnes et autres pièges non-vulnérants seront vos premiers alliés de lutte contre ce rongeur !

Ne restera plus qu’à lutter contre les limaces

Butte permacole ou forestière Sepp Holzer

Schéma butte forestière Sepp Holzer
Schéma butte forestière Sepp Holzer Canop'Terre

Originaire des pays de l’Europe de l’Est, cette technique de culture sur butte porte plusieurs noms, dont la « Hugelkultur », plus proche de son lieu de naissance.

Nous sommes là sur une vision à bien plus long terme de l’utilisation de la butte, avec des rendements pouvant aller de 10 à 20 ans.

Ce sont ici de véritables troncs qui feront office de support à la fertilisation de la butte qu’ils constituent.

À mesure que ceux-ci se décomposeront (lentement, comme on peut facilement l’imaginer), ils apporteront sur le long terme les nutriments nécessaires à la croissance des plantes.

En-cela, cette butte est souvent appelée « butte auto-fertile ».

Butte permacole ou forestière Sepp Holze

Explication en image de l'intérêt de la butte forestière

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Pour conclure

Quel que soit le type de culture sur butte que l’on choisit, il est indéniable que l’on se rapproche bien plus du mode de fonctionnement naturel des sols, respectant la biodiversité alentour.

Véritable rouage d’une agriculture vivante (du potager au maraîchage), cette technique permet de mieux appréhender les enjeux qui lient la production à l’environnement qui nous entoure.

Afin de ne pas verser dans l’angélisme, et vous l’aurez certainement compris, la mise en place de buttes demande cependant de déployer une énergie conséquente à sa réalisation. Tout du moins l’investissement est-il, pour une fois, à la force de nos bras et non à la taille de notre portefeuille !

Portrait de l'auteur

Quels type de butte de culture avez-vous déjà mis en place ? Avez-vous eu de bons résultats ?

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Portrait de l'auteur

Julien Hoffmann

Rédacteur en chef — DEFI-Écologique

Fasciné depuis 20 ans par la faune sauvage d'ici ou d'ailleurs et ayant fait son métier de la sauvegarde de celle-ci jusqu'à créer DEFI-Écologique, il a également travaillé à des programmes de réintroduction et à la valorisation de la biodiversité en milieu agricole.

Il a fondé DEFI-Écologique avec la conviction qu'il faut faire de la protection de l'environnement un secteur économique pour pouvoir réellement peser sur les politiques publiques.

 Julien est membre de DEFI-Écologique.

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Nous sommes navrés, mais suite à des problèmes techniques, le formulaire d'ajout de nouveaux commentaires est temporairement simplifié.

Une réponse à “Culture sur butte : pourquoi et comment ?”

    • Bonjour ! Effectivement le lien est intéressant et aborde aussi ce que l’on aborde ici entre campagnols, réel besoin d’une butte quand on a déjà un sol qui fonctionne bien et autre menues réjouissances. Merci à vous 😉