Le Tuit-tuit, l’un des oiseaux les plus rares au monde

Généralités sur l’Echenilleur de La Réunion

L’Echenilleur de La Réunion (Lalage newtoni) est appelé localement Tuit-tuit en raison du chant du mâle composé de « tuit » répétés. Ce petit passereau ne vit qu’au sein de la forêt de la Roche Ecrite, située au nord-est de La Réunion, dans les hauteurs de Saint-Denis et de La Possession. Ses populations sont réparties sur un habitat très localisé, d’une surface de 19 kilomètres carrés.

En 2022, la population connue est de 52 couples, c’est pourquoi l’espèce est classée par l’Union Internationale de Conservation de la Nature (UICN) en « danger critique » d’extinction (CR). Le Tuit-tuit est donc l’un des oiseaux les plus menacés et rares au monde.

Sa morphologie

A l’âge adulte, ce passereau mesure environ 20 centimètres. L’espèce présente un dimorphisme sexuel, ce qui signifie que le mâle et la femelle possèdent des plumages différents. Le mâle a un plumage gris cendré et blanc, un ventre crème, des ailes et une queue noire, tandis que la femelle est brune avec le ventre blanc strié de brun.

Comportement

Le Tuit-tuit est un oiseau peu craintif mais très discret ce qui rend son observation difficile. Le plus souvent, on n’entend que son chant, audible à plusieurs centaines de mètres.

Habitat

Le Tuit-tuit vit au sein de la forêt tropicale primaire d’altitude au cœur du massif de la Roche Ecrite. Cet oiseau forestier territorial est strictement associé à une végétation indigène de hauteur supérieure ou égale à 3 mètres.

Alimentation

Le régime alimentaire du Tut-tuit est majoritairement insectivore puisqu’il se nourrit à plus de 90% d’insectes : chenilles, phasmes et cratopus. Occasionnellement, il consomme des fruits comme ceux du Change-Ecorce, Tan rouge, Bringellier marron ou du Goyavier.

Reproduction

La période de reproduction de l’espèce a lieu durant l’été austral, entre début août et fin mars, avec un pic de reproduction entre fin octobre et début décembre. L’espèce construit un nid sous la forme d’une coupe de 10 centimètres de diamètre constitué de rameaux terminaux de Branle vert, de lichen et de fils d’araignée entre 2 et 18 mètres de hauteur sur de grands arbres.

La femelle pond deux œufs qui seront incubés par les deux parents pendant 15 à 18 jours. Le nourrissage et l’élevage des jeunes dureront ensuite 18 à 23 jours suivi d’une période de 3 mois dite de dépendance des jeunes durant laquelle les 2 parents nourrissent les jeunes après l’envol.

Son état de protection

Au niveau international, le Tuit-tuit est une espèce classée « En danger critique » d’extinction (CR) selon l’UICN, soit le dernier stade avant la disparition de l’espèce à l’état sauvage.

L’Echenilleur de La Réunion est protégé par l’arrêté ministériel du 17 février 1989 fixant les mesures de protection des espèces animales à La Réunion. Il est ainsi strictement interdit de «blesser ou mutiler, détruire, capturer, enlever ou naturaliser», cette espèce, qu’il s’agisse d’individus ou de pontes, vivants ou morts (J.O. 1989). Selon le Code de l’Environnement (2010), toute personne portant atteinte à cette espèce est passible d’un an d’emprisonnement et 15 000€ d’amende (Article L 415-3).

L’espèce est incluse dans l’annexe II de la convention de Nairobi, fixant les espèces de la faune sauvage exigeant une protection spéciale, ratifiée par la France. Dans ce protocole relatif aux zones protégées ainsi qu’à la faune et la flore sauvage dans la région de l’Afrique Orientale, il est établit que «Les parties contractantes s’attachent à protéger et préserver les écosystèmes rares ou fragiles, de mêmes que les espèces rares, en régression, menacées ou en voie d’extinction de la flore et de la faune sauvage et leurs habitats dans la région de l’Afrique orientale».

Les menaces

La principale menace qui pèse sur l’espèce est la prédation engendrée par le Rat noir et le Chat haret (ou chat errant). Ces deux espèces, introduites par l’homme, s’attaquent aux œufs, poussins et adultes de Tuit-tuit. Des études ont démontré que 95 % des nids du Tuit-tuit étaient prédatés par les rats.

De manière indirecte, les déchets abandonnés dans le milieu naturel, y compris ceux biodégradables comme les restes de pique-nique, représentent une menace puisqu’ils favorisent la prolifération des rats et des chats.

Les incendies sont également une menace importante pour cette espèce cantonnée sur une surface forestière de 19km kilomètres carrés.

Enfin, malgré l’absence d’études mettant en évidence les phénomènes de compétition, celle-ci est fortement suspectée par certaines espèces d’oiseaux exotiques tels que le Bubul orphée.

Les actions de protection

Depuis près de 20 ans, la Société d’Etudes Ornithologiques de La Réunion (SEOR) met en place des études et des actions visant à conserver l’espèce en partenariat avec le Parc National de La Réunion et de nombreux acteurs locaux.

Après un triste constat en 2003 de seulement 6 couples de Tuit-tuit identifiés, la SEOR a mis en place des actions de dératisation au sein de son habitat afin de limiter l’impact du rat. Ces actions ont permis de multiplier par 8 la population de l’espèce en 20 ans.

De 2010 à 2015, les actions de protection sont mises en place dans le cadre d’un premier projet européen, le Life+ CAP DOM, coordonné par la LPO France et déployé en local par la SEOR et leurs partenaires locaux. Ce projet a permis de financer des actions de dératisation sur plus de 700 hectares.

En 2012, la SEOR et le Parc National de La Réunion co-rédigent le premier Plan National d’Action en faveur du Tuit-tuit, une feuille de route faisant état de la situation de l’espèce et identifiant les différentes actions à mettre en place pour la préserver.

En 2016, les actions de dératisation ont été ouvertes à la population locale à travers la mise en place de chantiers participatifs, permettant à de nombreux bénévoles d’accompagner chaque année les salariés de la SEOR.

Depuis 2018, un nouveau projet européen coordonné par la LPO France, le Life BIODIV’OM, a vu le jour dont une partie concerne les actions mises en place sur la Réunion par la SEOR et le Parc National de La Réunion pour intensifier les actions de protection sur le Tuit-tuit. Grâce à ce projet et l’implication de plus de 150 bénévoles chaque année, les chantiers de dératisation ont permis de sécuriser plus de 1 000 hectares d’habitat. Des techniques innovantes supplémentaires sont venues compléter le protocole initial pour permettre une dératisation totale sur plus de 1 200 hectares.

En 2022, le nombre de couples de Tuit-tuit identifiés est de 52 couples.